Avec la même régularité que le changement d’heure, le comité interministériel du Grand Paris revient deux fois l’an depuis que Manuel Valls est Premier ministre. A pareille époque de surcroît. Mais cette troisième édition télescope aussi une campagne régionale. Cela rend cette revue de ce qui a été fait par la gauche dans la région capitale un brin suspecte.
Interrogé là-dessus lors de la conférence de presse qui a suivi le comité, Manuel Valls réplique avec un argument imparable. Il a «fait partie de ceux qui se sont félicité de l’engagement de Nicolas Sarkozy dans le Grand Paris» et ont «salué l’intuition de Christian Blanc», le secrétaire d’Etat sarkozien qui dessina le schéma du futur Grand Paris Express. «Nous avons continué avec les financements», dit-il.
Seul détour politique. Pour le reste, les comités interministériels sur le Grand Paris ressemblent de plus en plus à une to-do list sur laquelle le Premier ministre a tracé deux colonnes : «point d’étape sur les mesures annoncées dans les précédents CIM» et «mesures nouvelles». La deuxième résume évidemment les enjeux.
«Nouveau zonage» de la redevance
D’abord, le développement économique. «Les opportunités perdues se déplacent vers Londres ou encore Berlin», a prévenu Manuel Valls. Il a souligné que les chantiers du Grand Paris Express «vont permettre la création de près de 18 000 emplois» et que «les entreprises du Grand Paris estiment à 108 milliards d’euros les marchés supplémentaires engendrés par ce projet».
Plus largement, pour soutenir les emplois à l’est et en grande couronne, le Premier ministre mettra au débat dans la loi de finances «un nouveau zonage» de la redevance sur les créations de bureaux qui sera divisée par trois en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne et par deux en grande couronne.
Côté transports, les grands mots sont de sortie. «Le chantier du siècle a commencé», pose-t-il. Avec l’équivalent du réseau actuel à construire en quinze ans, la formule n’est pas excessive. «Tous les processus de déclaration d’utilité publique auront été lancés avant la fin de l’année 2016» et, martèle le Prenier ministre, «tous les chantiers du Grand Paris Express sont aujourd’hui financés».
Reste l’épineuse question de la liaison Charles-de-Gaulle-Express, destinée au seul aéroport et hors financements publics. «La société de projet sera créée début 2016», promet le chef du gouvernement. Il voit dans cette avancée un pas vers une desserte de l’aéroport «à la mesure de son envergure».
Un passe culture unique
Moins luxueux mais plus préoccupant pour les Franciliens : l’état des RER. Alors que la ligne A n’a pas cessé de tomber en carafe ces derniers jours, Manuel Valls insiste sur les «7,5 milliards d’euros» de la rénovation d’ici 2020. En fin connaisseur de la ligne D, qui dessert Evry dont il fut maire, il annonce que son invraisemblable exploitation sera «simplifiée».
Le Grand Paris doit aussi servir à développer l’aménagement et, surtout, la création de logements. Pour cela, le Premier ministre possède l’arme fatale : l’OIN, opération d’intérêt national, dans laquelle l’Etat reprend la main, même si les préfets assurent qu’on ne fait rien sans les élus. L’Etat agira «en faveur de quinze territoires dits d’intérêt national», a annoncé Manuel Valls. Les élus ne sont pas toujours ravis de le voir ainsi se mêler de leurs affaires mais le chef du gouvernement veut souligner qu’après les temps «des polémiques», il faut s’«engager ensemble». Les procédures nécessaires doivent être signées dans les six mois.
Dans la liste du Grand Paris, il y a aussi des mesures attrayantes. La programmation de la future cité Médicis de Clichy-sous-Bois «commencera dès 2016». Et un passe culture unique «qui devrait donner accès à tous les lieux culturels publics du Grand Paris» sera instauré. «Nous devons travailler avec le Stif pour qu’il fonctionne avec le passe Navigo unique». Bonne idée.
Sibylle Vincendon