Les révoltes de Henning Mankell

Le Nouvel Observateur. Vous vivez depuis plus de vingt ans la moitié de l’année au Mozambique et l’autre en Suède. Vous aimez dire: «J’ai un pied dans la neige, l’autre dans le sable.»

Henning Mankell. Rien ne m’obligeait à partir en Afrique: c’était un choix intime. A 20 ans, quand j’étais jeune auteur, j’avais la nette impression de rechercher un autre point de vue sur le monde que celui de l’ethnocentrisme européen. C’était il y a très longtemps, en 1972. J’ai débarqué en Guinée-Bissau, à l’époque encore colonie portugaise. Ce fut une expérience initiatique. C’est le même désir qui me pousse toujours à retourner en Afrique: pour avoir une meilleure perspective sur le monde. Je dis souvent que cette expérience africaine a fait de moi un meilleur Européen. C’est aisément explicable. Cette mise à distance me permet de mieux voir le monde – qu’il s’agisse de ma femme, de mon travail ou de ce que je lis dans le journal – et d’en percevoir lucidement le fonctionnement autant que les failles: l’importance persistante pour l’Europe de l’héritage des Lumières et de la Révolution française, mais aussi les problèmes qui se posent à notre continent. Ce que j’ai appris en Afrique m’a permis de devenir une personne meilleure, et donc, je l’espère, de vivre une vie meilleure. Grâce à l’Afrique, j’en sais davantage sur le monde.

Un exemple vous vient-il à l’esprit?

Le roman que je viens d’écrire s’appelle «le Chinois». Depuis quelque temps, je suis effrayé de voir comment les Chinois se comportent en Afrique. Ils me font l’effet de nouveaux colonisateurs, ce qui m’est d’autant plus pénible que j’ai grandi dans l’idée que la Chine aidait les pays africains à se libérer. Et si j’ai écrit ce livre, c’est parce que sur ces agissements je sais des choses que l’on ignore généralement. J’ai vu les Chinois à l’œuvre, au Mozambique et ailleurs en Afrique. La Chine a un problème de surpopulation rurale. Ses 200 millions de paysans ne cessent de s’appauvrir, et un jour ils risquent de se révolter et de «prendre la Bastille», c’est-à-dire de s’attaquer au Parti communiste. Les dirigeants chinois envisagent donc d’exporter le problème et de transplanter en Afrique les paysans les plus pauvres (pas moins de 4 millions d’entre eux!) pour qu’ils y cultivent la terre. C’est une forme terrible de colonisation, et c’est exactement ce qu’ont fait les Portugais autrefois au Mozambique.

On peut faire subir n’importe quoi aux pauvres. Et, bien sûr, les dirigeants du Mozambique tireront de cette politique chinoise un profit financier. Dans les années 1960, pendant mon adolescence, la Chine jouissait d’un immense prestige. Mao était parvenu à nourrir 1 milliard d’habitants. Mon prochain livre a donc aussi pour objet ma propre désillusion. Il y a cinq ans, la Chine a fait une donation au Mozambique, et en a profité pour y envoyer sa propre main-d’œuvre. Une rumeur a bientôt couru selon laquelle ces travailleurs chinois maltraitaient leurs homologues africains déjà sur place, mais le scandale a été étouffé. Cet incident a été pour moi un déclic: je me suis lancé dans des recherches en Chine et en Afrique qui ont abouti à ce livre.

Ce n’est pourtant pas le pétrole qui attire les Chinois au Mozambique.

Oui, il n’y a pas de pétrole, mais d’autres matières premières éveillent leur intérêt. La Chine manque de tout, notamment de matières premières. Elle voit aussi un moyen de résoudre ses problèmes en exportant massivement vers le marché africain. Si vous prenez l’avion de Johannesburg à Harare (Zimbabwe), vous constaterez que presque tous les passagers sont chinois. Ils sont en train de créer une situation sur laquelle les Africains n’ont aucun contrôle. De même, ils envoient en Algérie des milliers d’ouvriers, qui bien souvent étaient des prisonniers en Chine. Cela aussi, on l’ignore souvent. Ce livre, qui brasse beaucoup de questions, sera publié simultanément dans de nombreux pays en mai prochain, deux mois avant les jeux Olympiques de Pékin.

Vous dites: «Nous savons comment meurent les Africains, mais jamais comment ils vivent.»

Chaque fois que je reviens en Europe et que je regarde le journal télévisé, je ne vois que des images de mort. Mais les Africains vivent aussi: ils aiment, luttent, rêvent, travaillent. Et on n’en sait jamais rien. J’essaie donc d’offrir une autre image de l’Afrique que celle, majoritairement négative, véhiculée par les médias, auxquels j’en veux beaucoup. Pourquoi une telle situation? Aujourd’hui, l’Afrique ne représente pas grand-chose pour nous, économiquement et politiquement. Mais on a tort: dans ce contexte de mondialisation, on ne peut pas faire comme si l’Afrique n’existait pas. C’est un vaste malentendu. Et j’espère que les jeunes finiront par se révolter contre cet état de fait.

Quels sont les devoirs de l’Europe envers l’Afrique ?

Nous devrions d’abord faire en sorte que les Africains soient aussi bien nourris que le reste du monde. Si on demande où se trouve le centre de l’Europe, certains répondront Bruxelles (centre politique de l’Union européenne), Londres (centre économique et financier), Paris ou Berlin (en tant que foyers culturels). Pour moi, le centre symbolique de l’Europe, c’est la petite île de Lampedusa, au sud de l’Italie. Car c’est là qu’échouent chaque jour les cadavres d’immigrants clandestins venus d’Afrique. Je trouve ça dégueulasse [en français dans le texte]. Et ce scandale nous oblige à nous demander: pouvons-nous accepter un tel monde? N’y a-t-il pas un autre moyen d’envisager l’immigration? J’ai un rêve simple: construire un pont entre le Maroc et l’Espagne. Nous savons bien que nous avons besoin de ces immigrants.

Les immigrants et leur destin jouent un rôle important dans vos pièces de théâtre et vos romans.

C’est l’immigration qui a fait l’Europe. L’histoire européenne est une affaire d’immigration et d’émigration. Il y a un siècle, beaucoup de Suédois sont partis aux Etats-Unis en quête d’une vie meilleure, qu’ils y ont trouvée. Nous avons la mémoire courte! Les Européens conservateurs ont peur que les immigrants ne viennent leur piquer leur boulot. Foutaises! Ils viennent faire les boulots que nous ne voulons pas faire. Cette hostilité risque de nous poser des problèmes: dans vingt ans, quand nous serons très vieux, qui s’occupera de nous? Je place donc beaucoup d’espoir dans la jeunesse actuelle, car notre génération a perdu la bataille. Nous vivons dans un monde terrible, où les gens ne tirent aucune leçon de leur mémoire et de leur expérience. Je me demande ce que dirait Voltaire s’il voyait l’Europe d’aujourd’hui. Je crois qu’il s’exclamerait: «Il est grand temps de recommencer les Lumières!»

Quand vous retournez en Suède, comment voyez-vous l’évolution de votre pays ? Le modèle suédois, ce paradis social-démocrate d’Olof Palme, est-il un mythe ou une réalité ?

Je continue de croire que la Suède est une société juste, comparée à d’autres. Mais je suis conscient qu’elle est confrontée à des problèmes qui n’existaient pas il y a quinze ans. On assiste à une évolution dangereuse de l’Etat-providence. Certes, il était nécessaire de procéder à des réformes, mais beaucoup de celles-ci ont des effets négatifs. Je suis donc inquiet pour l’avenir. Même si aujourd’hui encore les immigrants qui arrivent en Suède se croient au paradis, en comparaison avec leur vie d’avant. Mais il faut veiller à ne pas perdre l’esprit de solidarité, qui est le fondement de notre société. Il faut être prêt à lutter pour le conserver.

Mais dans tous vos romans policiers la Suède n’a vraiment rien d’un paradis.

Ce paradis est un mythe créé par vous, et non par nous. Ce sont les étrangers qui ont été fascinés par ce «modèle suédois» et… par la blondeur des Suédoises! La Suède n’est pas responsable de la mythologie qui l’entoure. Et naturellement elle connaît son lot de problèmes, notamment celui que j’évoque dans mes livres: le rapport entre démocratie et système judiciaire. Si la justice dysfonctionne, la démocratie ne peut pas fonctionner. La Suède a connu de nombreux scandales, qui donnent à penser que la corruption et le crime organisé se développent. On constate même des tendances racistes, certes beaucoup moins prononcées que dans d’autres pays. Les Suédois ont suivi avec attention les émeutes dans les banlieues françaises. Nous n’en sommes pas encore là, mais cela risque d’arriver si nous ne sommes pas vigilants. Car la Suède a le même type de banlieues, exclusivement peuplées d’immigrés pauvres, et où le système éducatif est sacrifié.

Il y a quelques semaines a été organisé un voyage pour permettre à des adolescents des banlieues de Stockholm issus de l’immigration de découvrir la banlieue parisienne. A leur retour, ils ont tous déclaré qu’ils étaient mieux lotis! Mais il faut prendre garde. Le problème majeur est un problème de pauvreté, à la fois économique et culturelle. L’Europe tout entière souffre aujourd’hui d’ignorance. Il nous faut une nouvelle ère des Lumières, une nouvelle Renaissance. Je suis effaré par le manque de culture des adolescents. Un jeune Suédois récemment interrogé sur les causes de la Seconde Guerre mondiale a répondu que Hitler et Staline se disputaient Marilyn Monroe! C’est très drôle, mais c’est aussi consternant… Les jeunes ne comprennent pas que la démocratie peut être menacée par un retour du fascisme.

En quoi vos romans policiers sont-ils un bon miroir de la société suédoise?

Je crois que le recours à une intrigue criminelle est l’un des plus anciens procédés littéraires. Il suffit de penser à «Médée», une pièce écrite il y a 2500 ans, où l’héroïne tue ses enfants par jalousie. C’est un polar ou je ne m’y connais pas! Quand on me demande quelle est la meilleure intrigue policière jamais écrite, je réponds toujours «Macbeth». Le crime comme miroir de la société ne date donc pas d’Edgar Poe ou de Conan Doyle. Un crime, un conflit mortel agit comme un révélateur des pensées des personnages, des réactions de la société. Et puis, tout le monde aime lire un bon polar! L’intrigue criminelle est un bon moyen de capter l’attention du lecteur, de séduire les jeunes de banlieue par exemple. En Suède, j’ai beaucoup de lecteurs parmi les immigrants récents. Et j’en suis ravi, car cela veut dire que mes livres les aident à apprendre le suédois. Je suis convaincu que dans vingt ou trente ans un auteur de romans policiers finira par recevoir le prix Nobel. C’est un genre tellement vivant! Et qui oserait nier qu’un auteur comme John le Carré nous apprend des choses importantes sur notre monde?

Votre vie littéraire est très variée: vous écrivez des romans policiers, des romans «littéraires», des pièces de théâtre, des livres pour enfants. En outre, vous êtes éditeur et directeur de théâtre en Afrique. Comment parvenez-vous à concilier toutes ces activités ?

Je travaille beaucoup! Une journée n’a que vingt-quatre heures, et il est impossible d’emprunter cinq ans de vie à quelqu’un d’autre… La seule solution, c’est donc de décider ce qu’on ne va pas faire. Par exemple, si chaque jour je regarde la télévision une heure de moins que le reste des gens, cela me fait gagner 365 heures par an, ce qui laisse le temps de faire beaucoup d’autres choses. Un écrivain doit aimer tous ses livres d’un même amour, comme un parent aime ses enfants. Il ne peut en renier aucun. Et je crois profondément que tous mes livres ont un air de famille.

Vous définiriez-vous comme un écrivain engagé ?

Oui! Pour moi, c’est une évidence. Quand je me réveille le matin, je sais que je vais me retrouver dans un monde dont je ne peux pas faire abstraction. Un exemple: aujourd’hui, nous sommes en train de parler littérature, alors qu’il y a dans le monde des millions d’enfants qui n’auront jamais la possibilité d’apprendre à lire et à écrire. Pour eux, un livre n’est rien. C’est terrible. Mais le plus terrible, c’est que nous aurions pu remédier à ce problème depuis des années. Il y a deux ou trois ans, une organisation britannique, je crois, a évalué le coût d’une éradication complète de l’analphabétisme. Cela reviendrait très cher, mais pas plus cher que ce que nous dépensons chaque année en nourriture pour chats et pour chiens… Cela me révolte de penser que des millions d’enfants ne connaîtront jamais cette expérience merveilleuse qu’est la lecture. L’analphabétisme est une épidémie au même titre que le sida.

A Maputo, vous êtes metteur en scène du théâtre Avenida. Quel est votre répertoire ?

En ce moment, je monte «Un tramway nommé Désir» de Tennessee Williams. Je conserve le décor de La Nouvelle-Orléans, mais je transpose l’action au sein d’une famille noire, en 1995. La première aura lieu le 3 février. Il m’arrive de mettre en scène des tragédies grecques, mais comme 75% des spectateurs ne savent ni lire ni écrire, il ne faut pas leur imposer des intrigues trop liées à une autre tradition culturelle. Je pourrais très bien monter «Hamlet»: nous disposons des acteurs appropriés. Mais le public a besoin de connaître sa propre histoire. Voilà pourquoi j’écris beaucoup des pièces que nous montons.

Dans votre roman «Profondeurs», publié cette semaine en France, comme dans toute votre œuvre, les personnages sont souvent dépressifs. Appartenez-vous à cette tradition scandinave de la mélancolie et de l’anxiété, de Strindberg à Hamsun?

Si vous voulez de la littérature vraiment mélancolique, allez voir au Portugal ! Je ne suis pas sûr que la mélancolie soit un trait dominant de la culture suédoise ou scandinave. C’est un mythe propagé par les films de mon beau-père, Ingmar Bergman. Il disait souvent, pour rire, que tout ça était de sa faute! Mais il existe une mélancolie inhérente à l’Europe qui aujourd’hui se cherche une identité nouvelle.

De quoi parliez-vous avec Bergman ?

Nous étions très proches, très complices. Les dernières années, j’étais l’une des rares personnes avec lesquelles il restait en contact. Nous parlions beaucoup, le plus souvent de musique. On peut parler musique de mille façons différentes. Et il avait un petit cinéma pour lui tout seul. Nous avons dû regarder ensemble quelque 150 films: des classiques muets aussi bien que des films récents. C’était toujours passionnant d’écouter ses commentaires. Il était le premier lecteur de mes pièces. Il me manque beaucoup.

Avez-vous un souvenir à l’esprit?

Il était très heureux que, comme lui, j’aime «l’Heure du loup», un de ses films les plus méconnus, les plus mal-aimés. Je crois que je représentais pour lui le frère qu’il n’avait jamais eu. La dernière fois que je l’ai vu, c’était quelques jours avant sa mort. Je savais qu’il était mourant. Et de fait, il est mort à l’heure du loup, entre 4 et 5 heures du matin, l’heure à laquelle, dit-on, les gens naissent ou meurent.

La musique joue un rôle important dans votre vie.

Je rêve toujours d’écrire comme jouait Charlie Parker. Dans ses solos, il savait toujours où il allait, et c’est justement cela qui lui permettait d’improviser. J’ai beaucoup appris sur l’écriture grâce au Bird, à Coltrane, mais aussi à Bach. Ils ont été une inspiration en matière de technique littéraire. Pour moi, écouter de la musique est toujours source de réflexion.

Quels sont les trois livres que vous emporteriez sur une île déserte ?

On vient de célébrer le cinquantenaire du prix Nobel de Camus. Il a été un auteur très important pour moi, quand j’étais jeune. Et je le relis encore quelquefois, moins pour les histoires que pour sa façon de les raconter. Que serait le monde sans les écrivains français? L’un de ceux qui ont le plus influencé ma vie, c’est Balzac. Cela fait au moins trente ans qu’il m’accompagne. Son talent pour évoquer la société reste unique et inégalé. En matière de prose narrative, le maître absolu, c’est lui. Je choisirais dans son œuvre «les Paysans». Et j’emporterais sans doute «Cent Ans de solitude» de Gabriel García Márquez, un livre capital. Et si l’on veut comprendre ce que c’est qu’être humain, je prendrais «Crime et châtiment» de Dostoïevski. Enfin, si j’ai droit à un quatrième livre, écrit par un auteur vivant, je choisirais «Sourires de loup» de Zadie Smith, qui me paraît marquer le début d’une œuvre.

Propos recueillis par François Armanet et Gilles Anquetil

Bio

Né le 3 février 1948 à Stockholm, mort le 5 octobre 2015 à Göteborg, Henning Mankell est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages traduits en 27 langues, dont la célèbre série consacrée à l’inspecteur Kurt Wallander. Toute son œuvre est publiée au Seuil.

Source: «Le Nouvel Observateur» du 10 janvier 2008.

François Fillon contre l’exclusion de Morano

Tous les soirs, coulisses, brèves, choses vues et entendues par les journalistes de Libération, et pas lues ailleurs.

Punir Morano ? Fillon n’est pas chaud

Le cas Morano sera tranché mercredi par la Commission nationale d’investiture (CNI) du parti Les Républicains (LR). Plusieurs élus ne sont pas chauds pour voter l’exclusion de l’ex-ministre de la liste LR-UDI aux régionales en Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes. Hostile à «tous les procès en sorcellerie», François Fillon fait savoir qu’il ne soutient pas cette sanction, demandée par Nicolas Sarkozy.

Réchauffement et rafraîchissement à l’Elysée  

Le président de la République, François Hollande, lors d'une conférence de presse le 23 septembre 2015, à Bruxelles.«Les cours d’histoire c’est bien, mais il faudrait aussi des cours de futur et d’avenir.» C’est l’une des propositions transmises à François Hollande par quinze lycéens du Gers, âgés de 15 ans, de retour du cercle polaire. Le chef de l’Etat recevait ce lundi après-midi ces jeunes «ambassadeurs du climat» qui viennent de passer quatre jours sur l’archipel du Svalbard, en Norvège pour parler écologie, réchauffement climatique et COP21. «Les Etats privilégient l’économie, mais y-a-t-il une économie sans planète ?» lui a demandé Amandine. «On n’a pas d’autre planète, c’est vrai», a acquiescé le chef de l’Etat, qui ne veut plus «faire passer la question climatique après les autres» car «plus c’est tard plus c’est cher».

«Bleu blanc rouge», une étiquette très disputée

Former vice-president of the far-right Front National (FN) party Jean-Claude Martinez attends a press conference on July 11, 2013 to present a political initiative for the 2014 European elections aimed at defending "Family" and "Life". AFP PHOTO / MIGUEL MEDINAExclu fin août du Front national, Jean-Marie Le Pen avait annoncé le lancement prochain d’un nouveau mouvement : le «Rassemblement Bleu Blanc Rouge», destiné à réunir les marino-sceptiques de tout poil. Le label avait déjà été déposé par Nicolas Dupont-Aignan. Pas de quoi décourager un vieux compagnon de Jean-Marie Le Pen : Jean-Claude Martinez. Cet ancien député frontiste, qui a rompu avec le mouvement en 2008, a déposé la marque «Maison Bleu Blanc Rouge». «Dès que j’ai entendu Jean-Marie en parler, je me suis dit : si on le dépose pas on va se faire baiser, explique-t-il. Je n’en ai pas encore discuté avec lui, mais je suis prêt à l’aider.» L’étiquette connaîtra son baptême du feu à l’occasion des élections régionales de décembre, où Martinez sera candidat en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, tout comme l’ex-frontiste Jacques Bompard en Paca. Les affiches des deux hommes devraient porter la mention «soutenu par la Maison Bleu Blanc Rouge».

Burn out : Benoît Hamon veut aller jusqu’au bout

L'ex-ministre de l'Education nationale, Benoît Hamon, le 27 août 2014 à Paris.Benoît Hamon n’a pas lâché sa proposition de loi pour reconnaître le burn out comme maladie professionnelle. Pour l’instant, le gouvernement a gentiment enterré le dossier. Mais Hamon a repris sa plume : il a écrit à la nouvelle ministre du travail, Myriam El Khomri, pour vendre son idée. Et en attendant une réponse, il va envoyer une nouvelle missive à Manuel Valls et François Hollande.

Un député PS veut souffler les 110 bougies de la loi de 1905

French MP and rapporteur Philippe Doucet delivers a speech during the presentation of a report on the status of local representatives on June 19, 2013 at the National Assembly in Paris. AFP PHOTO / MIGUEL MEDINALa date du 9 décembre, qui correspond aux 110 ans de la loi sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat, n’a pas échappé aux socialistes. En vue de l’anniversaire, le député du Val-d’Oise, Philippe Doucet, chargé de ces questions pour le PS et le groupe parlementaire, planche sur une proposition de résolution – texte à valeur symbolique – instituant une «charte de la laïcité». L’idée étant de rendre intelligible par tous les grands principes de la loi de 1905. Et Doucet ne s’en cache pas, il ne veut pas laisser ce thème au FN. Ce «vallsiste» a rencontré les représentants des grandes religions, «y compris les bouddhistes», et des loges de franc-maçons. Avant de prendre langue avec les autres partis : il va contacter Thierry Solère, Gérald Darmanin et Henri Guaino pour LR. Un groupe de travail PS à l’Assemblée doit boucler ses travaux fin octobre.

Photos AFP

Le parquet demande le renvoi aux assises d’Abdelhakim Dekhar, le tireur présumé de «Libé»

Le parquet de Paris a demandé le renvoi aux assises d’Abdelhakim Dekhar pour des tentatives d’assassinats à BFMTV, Libération et à La Défense il y a près de deux ans. Un jeune assistant photographe de Libé, César, avait été gravement blessé le 18 novembre au siège du journal. Ces attaques avaient entraîné une vaste traque dans Paris. Le 20 novembre, grâce au témoignage décisif de l’homme qui hébergeait Dekhar à son domicile de Courbevoie (Hauts-de-Seine), il avait été interpellé dans un véhicule garé dans un parking de la ville voisine de Bois-Colombes.

A lire aussi : le témoignage de César, le jeune assistant photographe de «Libé»

Dekhar est aussi soupçonné d’avoir fait irruption le 15 novembre 2013 au siège de BFMTV, où, armé d’un fusil à pompe, il n’avait pas ouvert le feu, et d’avoir tiré plusieurs coups de feu devant le siège de la Société générale dans le quartier des affaires de La Défense, après son passage à Libération. Le parquet demande également son renvoi aux assises pour la brève prise d’otages qui avait suivi lorsqu’un automobiliste avait été contraint de le conduire jusqu’à la place de l’Etoile à Paris.

A lire aussi :le récit de la journée du 18 novembre 2013

Au moment de son interpellation, le suspect était à moitié inconscient, et la prise de médicaments laissait penser à une tentative de suicide. Dans une lettre, il évoquait de manière confuse l’existence d’un complot fasciste et s’en prenait à l’action des médias, des banques et la politique des banlieues. Dekhar s’était d’abord muré dans le silence, disant ne pas se souvenir des faits. Au cours de l’enquête, sa position a changé. Il a alors affirmé qu’il avait agi pour «frapper les esprits» mais qu’il n’avait jamais eu l’intention de tuer.

A lire aussi : le compte rendu des «aberrations de Dekhar»

Lorsqu’il a été arrêté, Abdelhakim Dekhar n’était pas un inconnu de la justice. Il avait été condamné en 1998 à quatre ans de prison pour avoir acheté le fusil à pompe qui avait servi à Florence Rey et Audry Maupin en 1994. L’équipée sanglante de ce jeune couple, qui fréquentait les milieux d’ultra-gauche, avait fait cinq morts dans Paris : trois policiers, un chauffeur de taxi et Audry Maupin. Après sa sortie de prison, il avait notamment séjourné en Angleterre.

LIBERATION

Onfray : « Mon problème, c’est ceux qui rendent Marine Le Pen possible »

Accusé de complaisance à l’égard de l’extrême droite, Michel Onfray semble prendre un malin plaisir à se retrouver au cœur de la mêlée. Au nom d’une légitime colère contre les injustices ? Ou d’un ressentiment contre des élites qu’il ne cesse de dénoncer? Interview.

L’Obs. Etes-vous vraiment pour une alliance entre les souverainistes de tous bords, du parti de Marine Le Pen à celui de Jean-Luc Mélenchon ?

Michel Onfray. J’ai moins le souci de ces deux-là que des électeurs souverainistes qu’on trouve disséminés à droite et à gauche. Je connais des gens de la France d’en bas qui votaient jadis à l’extrême gauche et qui soutiennent maintenant Marine Le Pen. D’anciens communistes, d’anciens cégétistes aussi.

C’est fini, l’époque où l’on passait sa vie avec le même parti. On était marié avec la droite, marié avec la gauche, on votait gaulliste, on mangeait communiste… L’électorat est devenu volatil. Il faudrait qu’en dehors des partis les souverainistes se retrouvent autour d’une figure issue de la société civile.

Vous, par exemple ?

On me le demande beaucoup, mais, non, je suis incompétent. Des gens de la mouvance de la gauche radicale m’ont déjà proposé d’être candidat aux présidentielles après m’avoir fait passer un examen dans le jardin d’un hôtel parisien. Ce qui m’a fait rire…

Je connais mes limites. Je ne vais pas me lancer dans un combat qui exige des compétences que je n’ai pas. Et puis la politique, c’est l’art du mensonge et de la compromission, je ne cours pas après ça.

« On ne dégonflera pas le phénomène Marine Le Pen en la comparant à Hitler ! »

Existe-t-il un souverainisme de gauche ?

Les souverainistes veulent recouvrer leur liberté d’agir. Qu’est-ce qu’un être souverain ? Quelqu’un qui n’est pas un esclave. Comment dès lors en est-on arrivé à ce retournement sémantique qui fait que «souverainiste» est aujourd’hui devenu une épithète infamante? Désormais, quand on parle du peuple, on est populiste ; quand on parle de démocratie, on est démagogue ; quand on parle de souverainisme, on est un vichyste.

Que s’est-il passé après 25 ans de droite et de gauche libérale au pouvoir pour qu’on en arrive au point qu’on préfère la servitude libérale à la liberté libertaire? Oui, il existe un souverainisme de gauche qui, hors parti, veut que la France recouvre sa liberté d’agir pour vouloir une politique en faveur des plus modestes.

Mais sur l’islam, par exemple, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon sont loin d’être d’accord…

En effet, cette question les sépare vraiment : pour elle, c’est un danger; pour lui, c’est une chance.

Et pour vous ?

Ni l’un ni l’autre. Je suis athée. Il faut faire une lecture exégétique du Coran, dans lequel on trouve de quoi justifier le meilleur et le pire. Evidemment, suivant l’imam, suivant le musulman, suivant le pays qui prélève telle ou telle sourate, vous aurez un islam plus ou moins compatible avec la république.

Dans les Evangiles aussi, vous trouvez le pire et son contraire. Dans celui de Luc, Jésus dit [de ses ennemis, NDLR] : «Egorgez-les tous devant moi» (19-27). Avec Jésus, vous pouvez obtenir la douceur et la compassion de François d’Assise tout autant que la violence et l’extermination chez Bernard de Clairvaux, le théologien des croisades. C’est le même Evangile!

Il y a deux façons d’être chrétien, comme il y a deux façons d’être musulman. Il y a des moments où l’islam peut être un danger, et d’autres non. Quand il est compatible avec les valeurs de la république, l’islam est une chance ; mais pas quand il se révèle incompatible avec la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité, le féminisme.

Selon vous, Marine Le Pen ne constitue pas un danger?

Mon problème n’est pas Marine Le Pen, mais ceux qui la rendent possible. Vous connaissez l’histoire du sage qui montre la lune et de l’imbécile qui regarde le doigt… Nombreux sont ceux qui regardent le doigt aujourd’hui. Pourquoi en est-elle là? A cause de la misère, de la pauvreté, du chômage, des promesses non tenues, des résultats de référendums mis à la poubelle, à cause du mensonge dans la classe politique, de la connivence dans le journalisme avec ce monde-là, à cause de la corruption dans l’Etat. On ne dégonflera pas le phénomène Marine Le Pen en la comparant à Hitler !

En revanche, nommer deux fois à la tête du PS des gens deux fois condamnés, oui, j’affirme que ce genre de signe, entre autres, fait le jeu du Front national. Tous ceux qui la rendent possible ont intérêt à dire que c’est elle qu’il faut regarder et non eux qui la rendent possible.

Comment luttez-vous contre le Front national ?

Depuis 2002, je lutte contre les idées qu’il véhicule. J’ai créé les universités populaires comme une machine de guerre contre les idées du Front national. Ainsi, je fais mon boulot de philosophe. De même quand je dis que c’est en bombardant des pays musulmans depuis 1991 qu’on a créé le terrorisme et que ce n’est pas en continuant qu’on le supprimera.

Selon l’Organisation mondiale de la Santé, les dix ans d’embargo en Irak ont fait 50.000 morts parmi les enfants de moins de cinq ans. Des morts qu’on ne voit pas à la télévision, mais qui existent tout de même. Quand la France et ses alliés rasent un village de 500 personnes pour tuer deux djihadistes, il est compréhensible que l’Occident suscite une haine contre lui chez les musulmans de la planète.

Il nous faut établir des liens de causalité là où l’émotion et la propagande d’Etat font la loi. Notre politique étrangère vis-à-vis des pays musulmans est belliqueuse : il serait facile de renoncer à cette politique pour assécher ce qui nourrit le terrorisme en France.

Propos recueillis par Elsa Vigoureux

Entretien paru dans le dossier Michel Onfray de « L’Obs » du 1er octobre 2015.

« Ta batterie » : Renaud revient sur l’album de Grand Corps Malade

Comme L’Obs vous l’avait annoncé dès le 15 septembre, Renaud fait son come-back avec Grand Corps Malade. Le génial auteur-interprète de Mistral Gagnant est en effet sorti de son silence pour collaborer au nouvel album du roi du slam intitulé « Il nous restera ça« , dont la sortie est prévue le 23 octobre. Et on en sait aujourd’hui un peu plus sur cette collaboration.

Figurant au casting de cet album où interviennent une dizaine d’autres artistes (Charles Aznavour, Hubert-Félix Thiéfaine, Richard Bohringer, Lino ou encore Erik Orsenna) sur invitation du toi du slam, Renaud interprète pour sa part un morceau intitulé Ta Batterie.

Un titre que Le Parisien a pu écouter en exclusivité. Evénement en soi, car aucun enregistrement de « la chetron sauvage » n’avait été dévoilé depuis 2009. Le quotidien explique qu’encore une fois, Renaud s’adresse à l’enfance, et en particulier à son fils Malone pour lui dire et chanter d’une voix « grave » et « fragile », sur fond de piano :

C’était ton anniversaire / Tu voulais une batterie / Une grosse caisse, une caisse claire / Tu voulais faire du bruit / Tape, tape, sur tes tambours / Tape, Malone, sur mon amour.

Un texte qui est le sien, mais où il presque a respecté le défi lancé au collectif d’interprètes de Grand Corps Malade, à savoir y intégrer la phrase : »Il nous restera ça ».

Car, comme l’explique Le Parisien, « dans la chanson de Renaud, elle devient : « Oui, tapes comme un sourd, il me restera ça« . Non sans qu’il mette en garde – poétiquement- son enfant contre les écueils qui l’ont tant blessé lui-même avec ces mots :

Tu voulais faire du bruit / Comme j’en ai fait parfois / Ca m’a bouffé la vie / Fais gaffe à tes petits doigts.

Avant de faire le constat de son trop long silence (en attendant son propre album, en préparation) et, encore une fois, de livrer les conseils d’un papa cabossé par la vie :

Moi je ne fais plus beaucoup de bruit / Tu l’as remarqué déjà / Oublie tous les vautours / Ton papa est bien là.

Bel augure pour le retour de Renaud qui a bien dû admettre, devant Grand Corps Malade : « Finalement, ce n’est pas si dur d’écrire une chanson« . Une chanson, peut-être. Mais avec l’exigence et le talent de Renaud, c’est une autre paire de manches…

Jean-Frédéric Tronche

Où sortir le soir à Calais ?

Où sortir le soir à Calais ?

Sinon au lieu d’être cons, vous pouvez aller au théâtre (il ne faut jurer de rien d’Alfred de Musset, c’est demain soir), au cinéma, au concert (le 10, il y aura Brigitte Fontaine)…(lire l’article)

Tuerie dans l’Oregon : «Levez-vous si vous êtes chrétien»

«Levez-vous si vous êtes chrétien». Racontée sur CNN par le père d’une étudiante gravement blessée, la scène glaçante se déroule jeudi matin à l’université de Roseburg, dans l’Oregon. Armé de trois pistolets et d’un fusil automatique, un homme vient de pénétrer dans une salle de classe et d’abattre le professeur d’une balle dans la tête. Pris de panique, les étudiants se jettent au sol, cherchant un abri illusoire derrière une table ou un sac à dos. Tout en rechargeant l’une de ses armes, le tireur ordonne alors aux chrétiens de se lever. «Bien, parce que vous êtes chrétien, vous allez voir Dieu dans une seconde», lance-t-il avant d’ouvrir le feu.

Pour la 45e fois depuis le début de l’année, une fusillade a éclaté dans l’enceinte d’un établissement scolaire américain, faisant au moins dix morts et sept blessés, dont trois graves. Il était 10h38, heure locale, lorsque les premiers coups de feu ont retenti. «J’ai entendu un « pop », presque comme un ballon qui éclate. J’ai compris que quelque chose n’allait pas. Nous avons fermé les portes, éteint les lumières, a raconté sur CNN une étudiante, Cassandra Welding, qui se trouvait dans une salle de classe voisine de celle où la fusillade a débuté. Nous avons appelé les secours et appelé nos parents, nos proches. Nous ne savions pas ce qui allait se passer, si c’était nos derniers mots ou pas».

«Vous ne m’entendrez jamais prononcer son nom»

Vêtu d’un gilet pare-balles et porteur de nombreuses munitions, le tireur était manifestement «préparé à un échange de tirs prolongé», précisent des sources policières. Il a finalement été tué lors d’une fusillade avec les forces de l’ordre. Officiellement, son identité n’a pas été révélée, mais selon les médias américains, il s’agirait d’un jeune homme de 26 ans, Chris Harper Mercer. «Vous ne m’entendrez jamais prononcer son nom», s’est contenté de déclarer le shérif du comté local John Hanlin, désireux de ne pas «glorifier» les actes du tireur. Pour le moment, et en dépit des témoignages faisant état d’une connotation religieuse, aucun mobile n’a été avancé. On ignore par ailleurs les liens du tireur avec l’université, notamment s’il y était étudiant. D’après les médias américains, les enquêteurs auraient commencé dès jeudi après-midi à interroger des membres de sa famille et de son entourage.

Dans la petite ville paisible de Roseburg, située dans une région rurale et reculée connue pour sa production de bois, la fusillade a suscité une onde de choc. Jeudi soir, des veillées à la bougie et des réunions de prière ont été organisées en hommage aux victimes, dont l’identité n’a pas été révélée. «Le plus grand choc sera lorsque leurs noms seront rendus publics et que l’on va reconnaître certains de ces noms», s’est ému le maire de la ville, évoquant un crime «insensé».

Hundreds of people gather for a vigil in Roseburg, Oregon on October 1, 2015, for ten people killed and seven others wounded in a shooting at a community college in the western US state of Oregon. The 26-year-old gunman, identified by US media as Chris Harper Mercer, was killed following a shootout with police. A visibly angry President Barack Obama made an impassioned plea for gun control in the wake of the shooting, blasting Congress for its failure to act in the face of "routine" mass killings. AFP PHO

Obama agacé par ces drames à répétition

Etrange coïncidence, la dernière fois que Roseburg avait fait parler d’elle, il était déjà question d’arme et de fusillade. Parmi les 21 000 habitants de la ville se trouve en effet un certain Alek Skarlatos, l’un des héros du Thalys Amsterdam-Paris. A des milliers de kilomètres de chez lui, le jeune réserviste de la garde nationale de l’Oregon avait contribué à empêcher un massacre, fin août, en aidant à maitriser le Marocain Ayoub El-Khazzani. Etudiant à l’Umpqua Community College, théâtre de la fusillade, il n’était pas présent au moment du drame.

Comme après chaque tuerie de masse aux Etats-Unis, le macabre rituel s’est répété : couverture «breaking news» sur les télévisions américaines, tweets de prières et de solidarité des responsables politiques de tous bords et déclaration solennelle de Barack Obama. «Comme je l’ai dit il y a quelques mois, et comme je l’avais déjà dit quelques mois auparavant, et comme je le dis à chaque fois que nous assistons à ces massacres, nos pensées et nos prières ne suffisent pas», a martelé le président américain, de plus en plus agacé par ces drames à répétition.

Le regard noir, Barack Obama a une nouvelle fois appelé – en vain – le Congrès à légiférer pour renforcer les contrôles sur les armes à feu. «Nous sommes le seul pays développé sur Terre où l’on voit de tels massacres aussi régulièrement», a ajouté Obama, qui a souvent dit que la tuerie de Newtown dans le Connecticut (26 morts, dont 20 enfants en décembre 2012) avait été «le pire jour de sa présidence». Selon le site Mass Shooting Tracker, les Etats-Unis ont vécu depuis le début de l’année au moins 294 fusillades ayant blessé ou tué au moins quatre personnes. Soit en moyenne plus d’une par jour.

Frédéric Autran Correspondant à New York

Le nouveau «gendarme des écoutes» validé sans discuter

Deux grands oraux en une journée. Le conseiller d’Etat Francis Delon était ce matin au Sénat et cet après-midi à l’Assemblée nationale pour convaincre les parlementaires. François Hollande a proposé sa nomination à la tête de la nouvelle commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), créée par la loi sur le renseignement.

Et les Parlementaires ont été séduits. Ils ont voté à une écrasante majorité en sa faveur. Seul un élu s’est abstenu et cinq s’y sont opposés sur les 49 votes enregistrés.

Ce «rôle essentiel dans la protection de nos libertés publiques», comme l’a décrit le rapporteur du projet de loi sur le renseignement, le député PS Jean-Jacques Urvoas, incombera donc à Francis Delon, 64 ans, qui a occupé de nombreux postes dans sa carrière de haut fonctionnaire : au ministère des Affaires étrangères, au ministère de l’Education nationale, au sein du Conseil d’Etat et jusqu’à la Commission de classification des œuvres cinématographiques. Une mission qui demandait elle aussi de «concilier deux intérêts et deux libertés : la liberté de création et la protection de l’enfance», a plaidé Francis Delon. Une allusion à l’arbitrage, plus sensible, qu’il devra désormais faire entre la vie privée et la défense des intérêts fondamentaux de la Nation.

Le nouveau président connaît les techniques des espions français

Mais l’expérience qui qualifie le plus Delon, comme il l’a lui-même reconnu ainsi que plusieurs parlementaires, est son passé de secrétaire de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN). De ces dix ans à la tête de cet organisme placé sous l’autorité de Matignon, Delon a tiré «sa bonne compréhension du renseignement technique». Le député LR Guillaume Larrivé a loué «sa connaissance des services».

L’occasion, pour Francis Delon, de répéter sa formule choc : «Connaissance ne signifie ni complaisance, ni connivence.» Car le nouveau président de la commission de contrôle connaît les techniques des espions français pour avoir assisté, de l’autre côté du manche, à la mise en place de certaines. En 2008, lorsqu’il était au SGDSN, l’Etat se lance dans la surveillance massive, par les services secrets extérieurs, des câbles sous-marins dans lesquels transite le trafic Internet.

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Aucun parlementaire ne l’a directement interrogé sur ce passé, les questions les plus critiques se concentrant sur la réalité du contrôle des dispositifs techniques les plus complexes instaurés par la nouvelle loi. Surtout les fameuses boîtes noires. Pour vérifier que ces algorithmes feront bien ce qu’ils doivent faire, ne ramasseront pas trop large, Francis Delon s’est engagé à recruter des ingénieurs, en plus de la personnalité qualifiée qui siégera dans la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Son entrée en vigueur devrait intervenir très prochainement.

Dans ses réponses écrites aux députés de la commission des lois, Francis Delon a avancé les moyens dont disposerait la commission : «dix équivalents temps plein (ETP) d’ici la fin 2015 et à dix-huit d’ici la fin 2016». Côté budget, presque 400 000 euros seront alloués à la commission en 2016, contre 110 000 euros aujourd’hui. Pour des missions toujours plus nombreuses, et toujours aussi cruciales.

Pierre ALONSO

Lichterfelde West, quartier maître de Berlin

Lichterfeld est un quartier résidentiel paisible et vert, truffé de villas parfois rocambolesques, incontournable pour les amoureux de l’architecture début du siècle. Rues pavées, becs de gaz dispensant le soir une chiche lumière jaune, allées plantées de tilleuls ou de marronniers… Du temps du Mur, une villa à Lichterfelde se vendait quelques dizaines de milliers de Marks, et aujourd’hui encore, le quartier est peuplé de nombreux soixante-huitards à la retraite, amateurs de ces jardins sauvages qui font aussi le charme du quartier. Ce tour d’une heure environ est idéal par une belle journée d’automne, lorsque les feuilles tombées laissent mieux deviner les façades parfois somptueuses du quartier. Au bout du parcours, la Karl-Platz offre une pause idéale, chez «Frau Lüske», un café proposant de très bons gâteaux ou brunchs.

L’histoire de Lichterfelde débute en 1865. Cette année-là, l’homme d’affaires et agent immobilier Johann Anton Wilhelm Carstenn achète le vaste Domaine endetté de Lichterfelde, pour y édifier un ensemble de luxueuses villas destinées à une haute bourgeoisie en pleine croissance. L’endroit présente un atout de taille: la ligne de chemins de fer, qui relie Lichterfelde au pouls urbain de la Potsdamer Platz en 20 minutes. L’édification en 1870 de la gare – l’une des plus belles de Berlin, dans le style toscan à la mode à l’époque et où commence notre visite– jouera un rôle central dans le succès commercial du lotissement.

La place de la gare est charmante, avec ses maisons peintes, notamment la «Emisch-Haus», ornée de motifs verts tirés de la Bible. En prenant à droite la Curtiusstrasse, la visite commence par une des plus belles villas de Lichterfelde : la «Villa Florentine» aussi appelée Villa Holzhüter, l’une des plus anciennes et les plus spacieuses du lotissement. Nous prendrons plus loin sur la gauche la Köhlerstrasse, puis la Friedrichstrasse également sur la gauche. Au coin avec la Kommandantenstrasse se dresse la Fondation Rother, une série de bâtiments de brique typique de l’architecture berlinoise de l’époque, où étaient logées les filles d’officiers non mariées et dans le besoin. Le bâtiment abrite aujourd’hui une maison de retraite.

Poursuivons dans la Kommandantenstrasse, ornées de belles maisons puis faisons un crochet sur la droite, dans le Weddigenweg comptant lui aussi de belles façades avant de retourner sur nos pas vers la Paulinenstrasse. Aux numéros 16 et 17, puis 24 à 28, se trouvent plusieurs beaux spécimens de maisons dessinées par l’architecte en mode à l’époque, Gustav Lilienthal, qui a construit à Lichterfeld plusieurs petits châteaux forts avec tourelles et pont-levis, délicieusement kitsch. Au bout du parcours, la Karlplatz offre une pause idéale. Les plus courageux peuvent poursuivre leur route vers le sud, vers la Potsdamer Strasse, puis plus à l’est la Walter Linse Strasse. Au numéro 12 vécut l’avocat ouest allemand défenseur des droits de l’homme Walter Linse. Critique du régime soviétique, il avait été enlevé en 1952 chez lui par la police politique de RDA la Stasi, livré au KGB, torturé en Union Soviétique avant de mourir à Moscou en 1953.

Nathalie Versieux Berlin, de notre correspondante

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